La Saint-Jean, dite Johannistag en allemand, est désignée en alsacien par son équivalent Johannesdàà. Toutefois, le terme le plus courant est Khànsdi ou Ghànsdi, mot que souvent on écrit Kànsdi à tort : il est important que la lettre « h » y apparaisse, car cela permet de comprendre le sens de ce mot dans lequel se trouve le prénom Hàns, qui signifie Jean en alsacien.
La Saint-Jean donne l’occasion de feux de bois gigantesques, plus rares de nos jours, qui créent du lien et de la joie : il faut ramasser du bois, l’entasser savamment et le faire flamber au cours de cette nuit, une des plus courtes de l’année. Le solstice d’été se fête depuis les temps les plus reculés en Europe. Il glorifie le dieu soleil et célèbre la lumière. On attribue aux feux de la Saint-Jean une puissance purifiante, tout comme la capacité de protéger les récoltes des orages et d’anéantir les puissances maléfiques. Certains amoureux avaient pour habitude de sauter par-dessus le feu en fin de consumation pour se garantir un amour éternel.
Ces feux sont de plus en plus rares. Jadis, on les allumait sur les hauteurs, mais également en plaine. Ils furent réglementés pour éviter les incendies. Ainsi, le magistrat de Strasbourg les a-t-il interdits à partir de 1408 à l’intérieur des enceintes de la ville.
Lorsque j’avais encore un noyer dans la cour, il arrivait que des voisins me demandent, autour de la Saint-Jean, s’ils pouvaient cueillir 24 noix vertes pour faire leur liqueur ou alcool de noix.
À cette époque, les noix sont vertes et dures. Elles ne contiennent pas encore de noix à l’intérieur de la coque, mais une eau transparente, incolore, qui noircit les doigts : c’est le brou de noix naissant. Pensez à mettre des gants avant la découpe pour éviter le désagrément des mains brunies.
La recette se fait aussi avec de l’eau-de-vie sans ajout de vin et s’appelle alors Nùsseschnaps. Celui-ci éveille souvent des souvenirs d’enfance : quelques gouttes posées sur du sucre ôtaient le mal de ventre, disait-on.
La recette de la liqueur de noix varie et elle suscite généralement un bel emballement. Vous m’écrivez sur mon site en m’apportant des précisions : Katchi Coco précise que dans sa recette de famille, elle utilise du marc de raisin comme eau-de-vie. Elle utilise aussi du sucre de canne et parfume avec des clous de girofle, un bâton de cannelle et de la badiane (c’est-à-dire avec des étoiles d’anis). Bernadette Guelluy précise qu’elle prend de préférence un vin du Sud (d’Espagne ou du Portugal).
À vous d’essayer et de célébrer la noix, cette petite merveille qui rythme notre année et nous récompense en toutes saisons.
Liqueur aux noix vertes de la Saint-Jean / Nüssewein
Recette extraite du livre Les meilleurs desserts d’Alsace (La Nuée Bleue)
Ingrédients pour 4 litres :
- 24 noix vertes cueillies à l’époque de la Saint-Jean
- 1/2 bâton de cannelle
- 5 clous de girofle
- 2 litres de vin rouge ordinaire
- 1 litre de schnaps (eau-de-vie de quetsches, de cerises ou d’un autre fruit)
- 1 kg de sucre en morceaux
1| Coupez les noix en quatre et disposez-les dans un bocal ayant une contenance d’environ 5 litres.
2| Ajoutez le bâton de cannelle ainsi que les clous de girofle. Versez le vin rouge et l’eau-de-vie. Puis ajoutez le sucre. Bouchez et laissez macérer pendant cinq semaines en remuant de temps à autre à l’aide d’une cuillère en bois.
3| Passez ensuite cette liqueur dans une passoire et mettez-la en bouteille. Elle est prête à être dégustée !
4| Cette liqueur est aussi exquise avec une tranche de gâteau de santé dit Gsùndhëitsküeche. Savourez-la aussi avec quelques biscuits secs de Noël aux amandes, aux noix ou à la cannelle.
