mercredi 13 novembre 2024
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Mon ami le sureau – Miner Frìnd de Holder

Je chanterai toujours les louanges du sureau. Je me réjouis pour sa brève et spectaculaire floraison en avril-mai. Ses ombelles parfumées, de couleur nacrée, sont parfois appelées la vanille du pauvre.

Le sureau fleurit. De Holder bliehjt. Le cri venait du cœur, car nous savions que les petites fleurs à l’arôme de muscat donnent tant de réjouissances. Nous avions un sureau proche de la maison et j’ai eu loisir de l’observer, depuis l’éclosion de ses feuilles en passant par son fleurissement puis le mûrissement de ses baies qui deviennent en été bleu foncées, presque noires.

Je garde un souvenir fort des beignets de fleur de sureau que réalisait ma mère au moment de la floraison. Elle trempait les ombelles dans la pâte pour les faire frire, et les saupoudrait de sucre glace une fois égouttées. La forme de ces beignets est d’un esthétisme inattendu et c’est un plaisir de mordre dans une ombelle tiède entourée de pâte croustillante. J’ai tenu à ce que ce dessert, à la fois beau et bon, figure dans mon livre Les meilleurs desserts d’Alsace. Maman parfumait aussi les crêpes avec le sureau : au printemps, elle secouait les ombelles au-dessus de la pâte et faisait tomber les fleurettes en pluie.

 

En arrière-plan une ombelle déjà en fleurs et à l’avant une ombelle aux fleurs encore fermées en formes de petites boules. / ©S.Morgenthaler

Hubert Maetz, le chef du Rosenmeer qui fut mon complice dans la série télévisée Sür un Siess, me servit récemment des fraises posées sur un fond de crème brûlée, surmontées de rhubarbe en compote, de streusel, le tout saupoudré de fleurs de sureau. L’idée est à retenir, car fraises et sureau se marient bien, tout comme rhubarbe et sureau qui donnent une délicieuse compote.

 

Lorsque Hubert Maetz et moi écrivions le livre La cuisine naturelle des plantes d’Alsace, le sureau nous a inspirés au point que nous avons dû freiner nos élans tant le chapitre devenait long. Voici quelques-unes de nos trouvailles :  vinaigre aux fleurs de sureau, beurre au sureau, sirop et limonade de fleurs de sureau, taboulé à la fleur de sureau, streusel de quinoa au sureau, vin aux fleurs de sureau, liqueur de sureau aux œufs, espuma de fleurs de sureau, pain de semoule aux fleurs de sureau, tartelettes de cerises au sureau, financiers à la fleur de sureau, gâteau de semoule à la fleur de sureau, teurgoule (du riz au lait) aux fleurs de sureau, crème chiboust aux ombelles de sureau, sans oublier la tisane de fleurs de sureau.

 

Le sureau, qu’il soit en fleurs, ou plus tard en baies d’un bleu foncé proche du noir, est aimé pour ses multiples vertus, notamment pour lutter contre les rhumes et les refroidissements. Le nom latin du sureau, sambucus nigra, est familier aux adeptes de l’homéopathie.  La décoction de ses fleurs est adoucissante pour la peau. Il est un cadeau de la nature, prisé depuis l’antiquité. Les fleurs attirent quantité de butineurs et ses baies feront le régal des oiseaux. Il est un refuge de prédilection pour les insectes, car ses branches sont creuses.  C’est à cette particularité qu’il doit son nom venu du grec sambuca, qui désigne une sorte de flûte que les bergers taillaient dans un morceau de son bois. Enfants, nous aimions d’ailleurs réaliser des sifflets avec son bois, qui est très tendre et facile à tailler.

Rhubarbe crue et fleurs de sureau à cuire en compote. / ©S.Morgenthaler

Apprécié depuis l’âge de pierre, tant pour ses vertus gustatives que thérapeutiques, il fleurit dans la mémoire populaire avec ses surnoms : « arbre aux fées », « refuge de sorcière », « pharmacien de la maison ». Les Anglais le considèrent comme protecteur du foyer et en plantent un lorsqu’ils s’installent dans leur nouvelle demeure. Ils le désignent par le terme elder ou elder-tree, proche du terme allemand Ellhorn ou Elderbaum. Les Allemands le désignent aussi par les termes Holunder, Holler, Holderbaum et Schwarzholder. En ma langue maternelle, il se nomme Holder ou Holùnder.

Cet arbre est omniprésent dans le paysage alsacien, souvent près des ruines, en lisière de bois, près des haies, des berges et parfois des décombres. Il appartient à la même famille que le chèvrefeuille, celle des caprifoliacées. Et il peut vivre plus de 100 ans. Il a besoin de soleil ou de demi-ombre. Voilà pourquoi on n‘en trouve jamais au cœur de la forêt.  Sa présence indique un sol riche en azote. Ses feuilles à l’odeur âcre donnent un purin qui éloigne les rongeurs. Pour le réaliser, faites tremper dans l’eau des feuilles de sureau noir pendant 3 semaines. Versez ensuite cette macération dans les trous de souris.

Limonade de fleurs de sureau. / ©RitaE

Dans le langage des fleurs, les ombelles de sureau symbolisent la bonté. N’hésitez pas à en offrir, pour créer un nouveau courant romantique, car un regain de bonté ne peut nuire. Veillez toutefois à vous dépêcher pour conter fleurette une fois ses ombelles cueillies, car elles fanent rapidement.

L’info en plus

Il existe une variété de sureau toxique : le sureau yèble qui a une floraison plus tardive (fin juin et juillet). Il est une plante d’environ 1 m à 1,50 m là où le sureau noir est un arbre qui peut atteindre 10 mètres de hauteur. À mûrissement, les ombelles de baies du sureau yèble sont toujours dressées vers le ciel alors que celles du sureau noir sont penchées vers le sol. En cas de doute, abstenez-vous !

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