Qu’est-ce qui vous a poussé à faire de la céramique d’art ?
Enfant, j’habitais dans un milieu rural sans beaucoup d’activités et isolé. J’ai évolué dans un environnement très naturel, avec beaucoup de matière. On m’a d’ailleurs fourni un filon d’argile avec lequel j’ai essayé de faire mes premiers petits pots, qui ont explosé dans le four. Ensuite j’ai exercé pendant dix-huit ans un métier dans l’informatique. J’ai eu envie de retrouver un travail de mes mains.
Vous venez de l’autre de côté de la France, de Bretagne. C’est d’ailleurs votre source d’inspiration.
Oui. Actuellement je réalise des Bretonnes, avec un semblant de coiffe bretonne. Je fais aussi des anges, des personnages avec des couleurs d’ocre, de lichen, de terre ferrugineuse, des émaux que j’ai développés et qui correspondent à ce que je retiens de cette langue qui m’est chère. J’ai travaillé des acrobaties : petite j’adorais gravir les échelles, les échafaudages. Le verre aussi, que je fonds et teinte avec des oxydes. Ça me rappelle un chaos granitique du centre-Bretagne, la mer.
Vos personnages ont les yeux fermés, pourquoi les faire ainsi ?
Même si les corps sont aux proportions humaines, les visages sont ceux de mon entourage, les yeux sont souvent fermés parce que je souhaite exprimer beaucoup d’intériorité. Je pense que j’ai besoin que mes personnages adultes aient un vécu, un voyage intérieur. J’arrive mieux à faire ressortir toute cette sérénité sur mes visages grâce aux yeux fermés. Les yeux ouverts c’est déjà du trop-dit pour moi, c’est déjà une direction et des expressions qui se donnent. Je peux très bien avoir des personnes qui courent avec les yeux fermés, parce qu’ils ont une voix intérieure qui les pousse, ils ont confiance et ils y vont.
Propos recueillis et rédigés par Anne-Sophie Feltz
