Skander n’a pas vraiment connu les conditions idéales depuis sa naissance. Il est né du mauvais côté du monde, dans un territoire en marge, celui du Neuf-Trois, là où les rêves ont la vie dure et où le futur reste un mot sur lequel on préfère ne pas s’attarder. La banlieue, Skander la connaît bien. Enfant de l’ASE (l’Aide sociale à l’enfance), le jeune garçon s’est construit entre un père inconnu et une mère dysfonctionnelle, trimballé dans le vaste monde des familles d’accueil, jeté dans les bras de ces mères de remplacement. Skander va bien vite découvrir que toutes les mères de substitution ne se valent pas et que pour certaines l’argent prime sur les sentiments. Dans la banlieue chez Madame Khadija, les règles ne sont plus les mêmes que chez Tatie Nicole. Le jeune garçon va vite voir ses rêves de réussite dénigrés par les lois d’une société où règnent l’inégalité et les combines de vies à la dérive. Il cherche sa place au cœur de cette cité et de ses lois, dans cette vie qu’il n’a pas choisie. Ici pas de dictionnaire Larousse pour étayer sa curiosité, on apprend en se frottant à la rue. Skander l’élève avide de savoir, intelligent, rêvant d’une carrière d’avocat et d’argent gagné honnêtement, va se retrouver pris, à cause de ses origines et de sa couleur de peau, dans les filets d’un monde obscur. Pourtant face aux lois de la cité, celles de la drogue, du trafic, de la violence systémique, le jeune homme ne lâche rien de ses rêves. Sur une ligne de crête vertigineuse, on le suit avec fébrilité. Les pièges se font nombreux et les tiraillements de l’adolescent sont multiples dans cette lutte contre ce destin qu’il se refuse à embrasser alors que les dés semblent pipés. Et l’on se demande comment s’en sortir lorsque tout s’oppose à la réussite.
Un récit sans filtre sur la banlieue et la dérive à laquelle elle condamne ses habitants.
C’est un roman percutant que livre ici l’auteur. On sent le vécu qui imprègne ses mots sans jugement ni misérabilisme, évoquant le fracas d’un monde avec beaucoup de pudeur. Ce roman est loin d’être un énième récit sur la banlieue et ses dérives, car ce serait je crois, oublier la voix de Skander, sincère et puissante et à travers elle les mots d’un homme, d’un écrivain qui a fini par donner vie à ses rêves de gamin, afin de demeurer vivant.