Elle est joyeuse, vive, drôle. Le sourire toujours accroché aux lèvres. Et puis, dans sa trousse de secours, la petite anecdote qui va bien, discrètement tapie mais prête à surgir à tout moment pour raviver votre neuroplasticité. Ceci dit, pas moyen, à son contact, de frôler l’encéphalogramme plat. Cette ancienne infirmière devenue pâtissière est à elle seule une parade contre l’ennui. Un tourbillon virevoltant qui laisse dans son sillage un exquis vent de fraîcheur. Alors on en veut encore. Un autre macaron s’il te plaît, Elisabeth ! On les adore ses macarons, évidemment, comme toutes ses créations sucrées d’ailleurs. Mais au fond, c’est pour elle qu’on fond. On aime la saveur franche de son authenticité, la vivacité de son audace, la douceur de sa bienveillance, son caractère bien trempé. Et cette palette de contrastes a comme un goût de reviens-y.
Masterchef, le tremplin d’une vie
Et puis, peut-être profite-t-elle de cette onction unique, de cette lumière si particulière projetée par le petit écran sur les personnalités qu’il révèle au grand public ? Car en décrochant brillamment le titre de Masterchef en 2011, Elisabeth a transcendé le cercle du commun des mortels pour rejoindre celui des légendes vivantes. Nous avons vu en elle une héroïne, une star, une inspiratrice. Elle nous a fait vibrer, elle nous a ému(e)s, elle nous a rendus fier(e)s. Nous les Alsaciens. Nous ses admirateurs, qui avons suivi ses prouesses gourmandes à la télé, sauté sur nos tables – quitte à les casser pour certains – à l’annonce de sa victoire. Nous, ses fournisseurs, ses clients, ses amis. Nous, ses connaissances, qui, comme moi, avons parfois la chance de la croiser, avec cette étrange impression de la connaître depuis toujours.
Quand Maxi Flash m’a confié cette chronique, j’ai immédiatement su que j’allais cuisiner Elisabeth Biscarrat. J’ai toujours voulu percer le mystère de cette personnalité hors du commun et découvrir son super-pouvoir. Car oui, je suis convaincue qu’Élisabeth Biscarrat possède un talent magique caché. Pas celui de la pâtissière virtuose ou de la star révélée par le petit écran connue de tous. Non, il y a autre chose. Une alchimie secrète que je rêve de décrypter.
Un projet au cœur de l’Église Saint-Paul
J’ai eu le loisir de lui poser mille questions autour d’un thé le jour de l’ouverture du marché de Noël. Elisabeth est comme à son habitude, très facile d’accès, pétillante et enjouée. Nous parlons d’abord de son actualité : l’ouverture imminente d’un salon de thé éphémère en plein cœur de l’église Saint-Paul à Strasbourg. Une magnifique opportunité tombée du ciel, qu’elle s’est empressée de saisir joyeusement. Ce projet atypique mené de bout en bout et exclusivement par des femmes réunies autour de Marie-Claire, pasteure de la paroisse, a été pensé à la fois pour animer le lieu de culte et favoriser la collecte de fonds pour les travaux de restauration du bâtiment. Si Elisabeth ne s’attend évidemment pas au miracle avec la vente de ses macarons et autres gourmandises, en grande fan d’architecture, elle se réjouit d’apporter sa pierre à l’édifice. Et puis, qui sait, même si son implication n’est aucunement motivée par son attachement à la religion… les voies de Dieu sont impénétrables !
Pour Elisabeth, c’est certes du temps et un investissement, mais surtout un bonus passionnant, avec de nouvelles rencontres, expériences et apprentissages à la clé. Et puis, il faut dire qu’en bonne dirigeante d’entreprise, Elisabeth Biscarrat est de nature à aimer les défis. Le travail, les responsabilités, les obligations, la gestion, la pression, c’est son quotidien ! Avec ses trois boutiques (Strasbourg, Roppenheim et Obernai) et ses dix salariés, la cheffe pâtissière a l’habitude de jongler entre mille et une tâches, d’anticiper l’imprévisible et de gérer l’ingérable. Après le covid, puis l’augmentation des coûts d’énergie, elle doit aujourd’hui faire face à l’explosion du coût des matières premières et notamment du chocolat, présent dans les ganaches de ses macarons.
Une cheffe pâtissière au cœur de tous les défis
Ce n’est pas tous les jours rose et douillet comme l’ambiance dentelle et tons pastel de son univers Macarons et Inspiration. Et son aventure entrepreneuriale a un coût. Mais l’ex-infirmière réanimatrice ne changerait de statut pour rien au monde. « J’ai la liberté de faire ce que j’aime », explique-t-elle, « de créer, de prendre mes propres décisions sans demander la permission à personne, d’organiser mon temps comme je l’entends. Et puis, quand tu gères une entreprise, tu rencontres un tas de gens et tu développes plein de compétences. En plus d’être pâtissière, j’ai appris à devenir DRH, comptable, gestionnaire, commerciale, responsable marketing et communication, community manager, photographe. En fait, tu apprends en permanence. Et tu deviens humble, car tu te remets tout le temps en question. »
Elisabeth me parle de ce quotidien qui semble loin d’être une promenade de santé, sans se départir un instant de son entrain. La passion et l’enthousiasme transpercent dans chacun de ses mots. Je suis un peu perplexe, j’avoue. Cette femme a plus qu’un super-pouvoir. Elle est sur-humaine !
Cela dit, à y regarder de plus près, son passé d’infirmière urgentiste lui a sûrement appris à gérer la pression et à être naturellement sur tous les fronts. Et quand on se bat pour sauver des vies, l’enjeu est autrement plus éprouvant.
« Avec ses trois boutiques
(Strasbourg, Roppenheim et Obernai) et ses dix salariés, la cheffe pâtissière a l’habitude de jongler entre mille et une tâches, d’anticiper l’imprévisible et de gérer l’ingérable. »
Résilience et renouveau
On en vient forcément à évoquer sa participation au concours Masterchef sur TF1. La fin de l’histoire, tout le monde la connaît. Ce qu’on sait moins, ce sont les circonstances dans lesquelles cette aventure a bouleversé son existence. Elle est alors en pleine convalescence après la naissance de sa seconde fille Louise. Cet accouchement difficile l’a laissée exsangue et les médecins lui prédisent au moins une bonne année pour s’en remettre.
« J’ai frôlé la mort, raconte-t-elle. D’ailleurs j’étais morte. Je me suis vidée de mon sang et mon cœur s’était arrêté. Un jour, Louise devait avoir 3 mois à peine, je me lève chancelante pour allumer la télé et là je tombe directement sur une annonce : « Vous aimez cuisiner, vous voulez changer de vie, inscrivez-vous à Masterchef. Je me suis mise directement devant l’ordinateur et j’ai commencé à remplir le dossier. »
En rembobinant le fil, on pourrait très bien refaire l’histoire. Sans sa convalescence, Elisabeth aurait-elle été happée par cet appel à candidatures ? Sans avoir frôlé la mort, aurait-elle ressenti l’urgence vitale de participer à un concours alors qu’elle tenait à peine debout ?
Elisabeth croit à la magie du bon moment au bon endroit. Elle devait gagner Masterchef pour embrasser son destin. Plus qu’un tremplin professionnel, cette expérience a révélé en elle une force et un tempérament insoupçonnés. Autrefois discrète, timide et casanière, elle est devenue une femme audacieuse et déterminée qui n’a jamais froid aux yeux. Courir les 10 km des JO sur un coup de tête, gérer trois boutiques, le ravitaillement d’un point de revente en Suisse, se lancer dans un projet de salon de thé dans une église ? Elle ose !
Je crois bien que son super-pouvoir, c’est l’audace ! Et c’est chez elle, plus qu’un trait de caractère, une vraie philosophie. « On n’a qu’une vie ,
dit-elle. Enfin normalement. Moi j’ai la chance de vivre ma deuxième. Alors j’y vais à fond ! Rien n’est impossible. »
Et c’est peut-être pour ça qu’on l’aime tant. Pas seulement pour ses pâtisseries qui enchantent nos papilles, mais pour nous faire goûter à la conviction que tout est possible.
Merci Elisabeth Biscarrat pour les Macarons et l’Inspiration !