Au réveil, j’allume la radio qui déclame son lot d’horreurs : guerre en Ukraine, conflits de la bande de Gaza, révélations sur les abus sexuels pratiqués dans le monde du cinéma, parole qui se libère, mais pas encore assez sur les actes de pédophilie, d’inceste et sur les féminicides qui augmentent. Les proviseurs et les professeurs vivent dans la peur alors qu’ils veulent exercer ce qui devrait être un beau métier : transmettre leur savoir pour faire d’un élève un être responsable et respectueux d’autrui.
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Au petit-déjeuner, la presse écrite m’apprend que la dette de la France est plus abyssale que prévu. L’État augmentera peut-être les impôts tout en promettant de ne pas le faire. La France ne tient-elle pas le record des impôts les plus élevés ?
La lecture du journal m’apprend aussi les raisons des piratages et des menaces d’attentats qui déstabilisent l’Éducation nationale. Ces actes sont souvent menés par des adolescents sous prétexte de fanatisme ou pour cette raison renversante : « Il faut bien occuper le temps ».
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Aujourd’hui est un jour honni car il me faut appeler l’administration pour résoudre un problème. Là commence le chemin de croix pour accéder à un humain. Il y a ces voix de répondeur insupportables, puis l’attente. Lorsque vous pensez avoir accédé à une voix humaine, une voix synthétique vous apprend que le temps d’attente estimé est de 12 minutes et que l’appel est susceptible d’être enregistré. Au bout de 10 minutes à entendre la même musique grésillante, la même voix synthétique, l’appel est brutalement… coupé.
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Il me faut à ce stade respirer profondément pour sortir de la colère avant de reprendre ma croisade. Je m’attends si peu à aboutir que lorsque j’entends enfin une voix humaine sortie des limbes, je suis si interloquée que j’ai presque oublié la raison de mon appel.
On sonne à ma porte : c’est un livreur qui veut laisser un paquet pour le voisin qui n’est pas chez lui. Il est hyper stressé, laisse tourner le moteur de sa camionnette qui déblatère du rap à fond les gaz. Je mets une griffe sur l’écran de son smartphone. Passe une femme qui me demande si je n’ai pas d’habits pour elle, ou un peu d’argent ou n’importe quoi d’autre ; même un paquet de petits gâteaux fera l’affaire. Puis c’est un couvreur qui m’accoste : il pense que mon toit aurait besoin de ses soins et il me laisse un prospectus.
Je rallume la radio. Il va falloir trouver 10 milliards d’économies. Pourvu que ce ne soit pas sur le dos des hôpitaux déjà si impactés, et de notre médecine qui était, il n’y a pas si longtemps, « la meilleure du monde » ?
Mon smartphone m’informe par SMS qu’un colis n’a pu être livré et que je dois cliquer sur un lien qui est en fait du « fishing », une tentative frauduleuse d’hameçonnage.
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À partir de 14 h, alors que j’aspire juste à un peu de paix, le téléphone sonne à diverses reprises : on m’appelle de l’autre bout de la planète pour me vendre ce dont je n’ai pas besoin.
Au septième appel, alors que je m’apprête à dire que mes nerfs sont rudement éprouvés, j’entends un message enregistré « du gouvernement » qui m’informe « que j’ai le choix entre plusieurs contrats de gaz ».
Le soir est là. Je sais déjà que je ne trouverai pas d’espérance devant la grand-messe du journal télévisé de 20 heures. Il est bien connu que l’audience la plus forte est générée par les mauvaises nouvelles. Alors, comme je ne me sens plus apte à supporter une once de noirceur, je consulte les courriels.
Une fausse policière m’informe que je fus filmée dans une situation délictuelle, contraire à la morale, dont elle détient l’enregistrement, et que je vais devoir payer l’amende en pièce jointe.
Un autre courriel m’envoie un avis de restitution d’impôt par la Direction générale des Finances publiques. Il ne faut surtout pas succomber à cette bonne nouvelle, car c’est un piège.
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Je réalise que je n’ai pas encore cherché le courrier dans ma boîte aux lettres.
Une lettre de l’Institut du cerveau me remercie pour le soutien que j’ai apporté par mon don. Elle précise que les essais en cours sont porteurs d’espoir, mais, que pour les faire aboutir au plus vite, mon soutien demeure indispensable. Cela concerne notamment la sclérose en plaques, mais la recherche doit aussi avancer pour « Alzheimer, Parkinson, SLA, AVC, épilepsie, tumeur cérébrale, dépression, TOC, autisme, Huntington, maladie neurologique rare et lésions de la moelle épinière ».
Je vous entends dire : « Je te donne la main, Camarade Simone, car j’ai vogué dans la même galère que toi ». Au même instant je réalise que je ne souffre d’aucune des maladies pour lesquelles on sollicite ma générosité. Je tiens ma bonne nouvelle du jour ! C’est l’heure d’aller au lit. Il faut bien puiser la meilleure des énergies pour demain.