jeudi 21 novembre 2024
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Eric Borner – Une vie de magie

Il a été le plus jeune magicien de France, il a vite été propulsé sous les projecteurs, à la télévision ou à la scène, il a côtoyé des stars. Lui qui aime la lévitation a pourtant su garder les pieds sur terre. Éric Borner surprend par son talent et son humilité. Rencontre avec un artiste passionné, qui prône la magie « pure », sans effets de manche ni fioritures pour se concentrer sur les vibrations et les émotions.

Pourquoi avez-vous voulu faire ce métier ?

Quand j’étais enfant, je regardais beaucoup de spectacles de magie à la télé, je les voyais faire voler des fleurs, faire apparaître leur partenaire sur scène. À six ans, j’ai perdu mon frère dans un accident de voiture. J’ai voulu devenir magicien pour le faire réapparaître. En créant l’illusion, on peut faire apparaître un rêve et continuer à partager des émotions.

Comment avez-vous démarré ?

Internet n’existait pas encore à l’époque alors j’ai pris l’annuaire et j’ai écrit à tous les magiciens d’Alsace. Un seul m’a répondu, Kinos, un magicien de Wittenheim. Dans sa lettre il me disait qu’un tour de magie dévoilé était un tour condamné, mais il m’a listé des adresses où je pouvais me procurer des secrets de magie. Suite à cela, j’ai acheté un livre de magie et un jeu de cartes et je me suis entraîné. J’avais une dizaine d’années.

Puis vous êtes monté sur scène ?

J’ai présenté mon premier numéro de magie à la fête de fin d’année de mon club de natation à Saint-Louis. Mes parents n’étaient pas au courant, c’était une surprise. Avant mon tour, un vieux monsieur s’est assis à ma droite et m’a demandé qui m’avait enseigné la magie et si je l’avais déjà rencontré. J’ai répondu que je ne le connaissais pas, que j’avais reçu seulement une lettre. Il m’a dit bonne chance pour ma représentation. C’est seulement à la fin de mon numéro qu’il m’a avoué être le monsieur de la lettre. J’ai trouvé touchant qu’il ne me le dise pas avant. Il a su ne pas faire monter le stress. À partir de ce jour, nous nous sommes rencontrés régulièrement. Puis j’ai présenté mon premier spectacle de magie à l’âge de 13 ans, en 1995 à la salle des fêtes de Saint-Louis devant 500 personnes. J’avais énormément de trac.

À partir de quand avez-vous décidé d’en faire votre métier ?

Je ne pensais pas qu’on pouvait en faire son métier. Mais après ce spectacle il y a eu des articles dans la presse, puis d’autres manifestations, puis de plus en plus de représentations… Et c’est devenu mon métier naturellement.

Comment vous êtes-vous formé ? Il n’existe pas d’école de magie comme dans les livres de J.K. Rowling…

C’est beaucoup de lecture, de rigueur, de la discipline, de la curiosité. Et surtout de la patience, c’est une qualité intrinsèque pour faire ce métier.

Éric Borner / ©Documents remis
Après les premiers spectacles en Alsace, que s’est-il passé ?

En 1999, je participe à l’émission Graines de Star sur M6, en 2007 je termine finaliste de La France a un incroyable talent sur M6, en 2013 j’ai présenté un numéro de carte qui a été sélectionné comme coup de cœur dans l’émission Le Plus Grand Cabaret du monde présentée par Patrick Sébastien sur France 2. Suite à cela, j’ai été contacté pour de nombreuses représentations en Europe. Je parle allemand et anglais donc je peux créer des numéros et des spectacles sur mesure.

Vous avez vite connu la lumière. C’était l’un de vos objectifs ?

Non. L’objectif était de rendre hommage à mon frère disparu et de partager des moments précieux. Ensuite la lumière se fait naturellement. C’est un métier un peu « bling-bling », mais je n’aime pas cet aspect. Je suis en quête d’une magie pure, sans artifices. J’essaie d’aller à l’essentiel pour chercher l’émotion. Je pense que la magie ne vaut que pour le partage, le lien, la cohésion humaine.

Vos numéros exigent concentration, dextérité, bonne condition physique. On imagine que c’est beaucoup de travail.

Oui je m’exerce quatre à six heures tous les jours. Mais je le vois comme un jeu et puis c’est une passion. Je garde la notion de plaisir dans le travail et dans l’apprentissage. Selon moi, il n’y a pas d’échecs, il n’y a que des rebonds. On a le droit de se tromper, cela fait partie de l’apprentissage.

Qui sont vos modèles ?

Jean-Eugène Robert-Houdin, illusionniste français du XIXème siècle qui a révolutionné l’univers de la magie, Harry Houdini, de son vrai nom Ehrich Weisz, magicien autrichien du XIXème siècle spécialiste de l’évasion spectaculaire. Parmi les contemporains, j’aime l’Américain David Blaine : il a su mixer la performance physique à sa magie. Je trouve intéressant d’utiliser l’illusion, la performance physique et le mentalisme et de relier tout ça à l’art. J’apprécie beaucoup aussi le travail de Marina Abramović, une artiste serbe qui a fait du happening. Mais je trouve qu’il existe énormément de choses inspirantes, la musique, Mozart, De Vinci…

Hormis la magie, qu’est-ce qui vous fascine ?

Les arts : la musique, la peinture, la photo, l’art culinaire en tant que bon épicurien ! Je suis très curieux de tout. L’être humain me fascine : ses capacités physiques, mentales, la façon dont il peut adapter son corps et son esprit, que ce soit une danseuse étoile, un chef d’un grand restaurant, un chirurgien… Les personnes engagées dans des associations qui ont la volonté d’aider leur prochain, cela me fascine aussi. C’est ce qu’il manque aujourd’hui, je pense qu’il faudrait nourrir davantage la passion, l’écoute et apprendre à aimer ce qu’on fait, aimer son prochain.

Quels sont vos projets pour 2024 ?

Je prépare un nouveau spectacle tout public pour la fin de l’année qui mélangera performance physique et artistique. Je travaille aussi sur un nouveau séminaire pour les entreprises sur la gestion émotionnelle et sur la motivation. Je garderai aussi des moments pour faire du close-up (magie de proximité). J’aime créer et repousser mes limites.

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