Le téléphone a sonné une première fois, ce 31 août 1997, un peu après 4h00 du matin. L’infirmière a dit « tenez-vous prêt, je ne suis pas certaine, mais tenez-vous prêts ». À 5h50, c’est le professeur B.R. en personne qui appelle. Dans la petite maison derrière le Temple des calvinistes à Cosswiller, tout le monde est réveillé, le scénario a été mille fois envisagé et répété. « On est prêt », dit le papa d’Artémis. Sa fille souffre depuis trop longtemps d’une cardiomyopathie dilatée, plus aucun traitement, plus aucun médicament ne pourrait la sauver. Seul espoir, une greffe. Artémis est sur une liste d’attente, l’horreur, car on en est à se réjouir de tous les accidents possibles.
C’est un conducteur ivre au volant d’une grosse Mercedes à Paris, il roulait à plus de 150 km/h, il a heurté un pont, il y a 3 morts et une jeune femme de 37 ans est en coma vigile, impossible à réanimer. L’hélicoptère de la protection civile transportera la jeune patiente à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière. Le professeur A.P., considéré comme l’un des meilleurs chirurgiens cardiaques, est déjà sur place, c’est lui qui a tenté de réanimer l’accidentée. Déchirure du péricarde et de la veine pulmonaire gauche, mais la transplantation de la partie cœur est tout à fait envisageable. « Vous êtes la première compatible sur la liste ».
Il y a toujours beaucoup de hasard quant aux malheurs de la mort et aux bonheurs de la vie. Précisément l’hôpital de la Salpêtrière où la jeune femme est décédée a été le pionnier en chirurgie de transplantation. L’opération sur la jeune alsacienne se déroule parfaitement bien.
Aujourd’hui, Artémis mène une vie normale. La convalescence fut longue, mais ce simple cœur, qui avait peut-être beaucoup aimé, a continué de vivre. Artémis est redevenue une jeune fille tout à fait ordinaire, elle a épousé son prince charmant et le couple a construit un héliodome, une magnifique maison qui ressemble à un diamant la pointe en bas, comme si c’était un immense cadeau lancé du ciel depuis une tiare d’or, d’argent et de perles. Et leur plus beau bijou c’est leur petite fille qu’ils ont prénommée Diana…
Ambroise Perrin