samedi 27 avril 2024
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Les poteries rouges de Jules César au Heiligenberg

Jules César aimait l’Alsace, enfin notre territoire à gauche du Rhin, ici chez nous. Il n’aimait pas les Belges même s’ils étaient les plus braves parce qu’ils étaient éloignés des raffinements de la civilisation romaine et il craignait les Germains, continuellement en guerre, qui interdisait l’accès à leur territoire par des combats presque quotidiens. Nous sommes en 55 avant Jésus-Christ, César vient d’envahir la Grande-Bretagne et s’en retourne en Gaule, il ne veut donc pas aller trop au nord, ni trop à l’est. Le voilà sur la rive gauche du Rhin, notre belle Alsace, face aux « Champs décumates », la Forêt Noire. La deuxième légion, 6000 hommes répartis en dix cohortes, aménage un camp à Argentoratum, Strasbourg, qui devient une base administrative. Jules César souhaite prendre un peu de repos, il s’installe au Heiligenberg pour s’adonner à son loisir, la céramique sigillée. Le redoutable conquérant guerrier César se délasse et devient un sympathique Jules artisan alsacien tournant de jolis petits pots lisses et décorés d’un vernis rouge et brillant aux décors en léger relief, imprimés à la roulette. Des vestiges de son atelier ont été découverts près de Dinsheim, à l’ouest de Molsheim. Des fouilles ont mis à jour un vaste ensemble de fours, indiquant la poursuite de cet art pendant plusieurs siècles, pour produire des ustensiles en céramique, des lampes à huile, des amphores, des briques, des tuiles… Une coupe en sigillée décorée par Jules César se vendait au marché d’Appiacum (Epfig) 5 sesterces, la cruche ne valait que 1 sesterce, la mesure de vin 1/4 de sesterce, mais 2 esclaves étaient vendus 5048 sesterces. Un esclave alsacien valait donc un peu plus de 500 coupes en céramique. Mais le temps des poteries alsaciennes fut aussi celui de la stratégie. Face aux présomptueux et offensants raids des Germains, César décida d’apporter son soutien aux Ubiens, une tribu germanique alliée de Rome. Il fallait donc traverser le Rhin, et le faire majestueusement : de simples barques semblaient indignes au général et à ses troupes. César va construire deux ponts en bois, considérés comme des chefs-d’œuvre d’ingénierie militaire, pour traverser rapidement le fleuve. Dans ses « Commentaires sur la Guerre des Gaules », César précise que ces ponts furent détruits après le retour des troupes, pour que les soldats romains, au repos après avoir battu les tribus germaniques, goûtent sans crainte aux douceurs alsaciennes.

Ambroise Perrin

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