Dix ans après les attentats du 13 novembre 2015, la sidération et la douleur demeurent vives. Le livre d’Aurélie Silvestre, Déplier le cœur, en porte la trace brûlante. L’autrice y revient sur la nuit où tout a basculé : Matthieu, l’homme qu’elle aimait, a été tué au Bataclan, la laissant seule avec leur petit garçon et une grossesse de cinq mois. Face à l’effondrement, une question s’impose : comment continuer à vivre lorsque le monde s’est brisé ?
Aurélie Silvestre choisit la vie, malgré le gouffre. Elle avance comme une funambule, tentant de retrouver un équilibre au bord du vide. L’écriture devient alors un soutien, une manière de transformer l’absence, de rendre habitable l’après. « Il faut continuer à vivre et s’aimer plus fort encore », écrit-elle. Cette phrase, simple et lumineuse, devient sa boussole. Après avoir raconté la chute dans son précédent livre, elle décrit ici la remontée, lente mais déterminée.Le récit s’enracine dans le procès des attentats, neuf mois d’audiences durant lesquels victimes, accusés et magistrats rejouent l’impensable. Dans cette salle blanche hors du temps, l’autrice écoute, consigne, observe.
Revivre la douleur est inévitable, mais elle cherche la justesse : comprendre, transmettre, sans céder ni à la haine ni à l’oubli. Au milieu de ces heures lourdes naît pourtant quelque chose d’inattendu : une amitié profonde. Une « bande des six » se forme au fil des audiences, unie par l’épreuve. Entre les bancs du tribunal et le bistrot où Régis veille sur eux, les rires reviennent peu à peu, d’abord fragiles puis libérateurs. La vie, obstinée, reprend sa place. Déplier le cœur n’est pas un livre sur le deuil, mais sur la reconstruction. Une ascension humaine en terrain escarpé, où la solidarité fonctionne comme une corde de survie. Un texte bouleversant qui rappelle qu’au-delà de l’effroi, la lumière de la vie finit toujours par percer.


