David Thomas, maître des nouvelles brèves récompensé en 2023 avec Partout les autres, revient avec un livre d’une tout autre ampleur. Il y raconte Édouard, son frère aîné, disparu en 2022 après avoir longtemps combattu la schizophrénie. Un récit bouleversant, écrit sans fard ni pathos, où l’auteur avance à découvert pour dire l’amour, la douleur et la fidélité. Ici, pas de portrait réduit à la maladie.
Thomas refuse de laisser la schizophrénie avaler toute l’histoire. Édouard apparaît dans sa pleine humanité : un jeune homme drôle, passionné de blues, rêveur au regard vif. Chaque page résonne comme un éclat de mémoire, une tentative de préserver la beauté fragile de celui dont la vie a brisé les élans. Le livre explore ce lien fraternel indéfectible, fait d’admiration, de culpabilité parfois, et surtout d’une tendresse inaltérable.
La maladie est décrite comme une ombre qui surgit, imprévisible et destructrice, mais jamais comme une identité. Car Édouard n’est pas seulement « un malade » : il est un frère aimé intensément, condamné à traverser une mer en furie. Avec une justesse poignante, Thomas raconte l’épuisement d’une famille, les illusions de pouvoir aider, le désarroi de s’éloigner. Mais il raconte aussi – et surtout – la persistance de l’amour, même abîmé, même contradictoire. C’est ce fil rouge qui guide l’écriture, tendue entre pudeur et nécessité, toujours soucieuse de ne pas tomber dans le voyeurisme.
Un texte vibrant, qui résonne longtemps après lecture
Malgré la rudesse du sujet, une poésie traverse ces pages. On referme le livre avec l’impression d’avoir touché quelque chose de précieux : la preuve qu’écrire peut être un rempart contre l’oubli. En restituant à son frère son visage entier, David Thomas signe un texte bouleversant, à la fois hommage et acte de fidélité.
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