Les Garçons de l’été est un livre qui ne se lâche pas, noir et dérangeant malgré ce titre et cette couverture qui pourraient laisser penser à une romance aux effluves de monoï. Ce serait bien mal connaître l’autrice qui a ce don d’emmener le lecteur en eaux troubles, dans les profondeurs de l’âme humaine, enfouies sous le vernis des conventions. Ici elle plante son décor à Biarritz au cœur d’une famille bien sous tous rapports. Le père est pharmacien, la mère consacre sa vie à ses trois enfants, ses fiertés. Thadée et Zachée, les deux grands garçons sont étudiants, beaux, athlétiques et promis à un avenir brillant. Quant à Ysé la cadette, c’est une petite fille un peu étrange, mais très sage. Les deux aînés ont une passion commune : le surf, qu’ils pratiquent dès qu’ils le peuvent et dont ils parlent tout le temps. Lorsqu’ils décident d’aller chercher la vague à la Réunion « tout part en vrille », le jour où Thadée se fait arracher la jambe par un requin. La noirceur s’installe et le bonheur se délite. Les eaux calmes sur lesquelles la famille évoluait vont laisser place à un raz de marée incontrôlable et destructeur. Les masques tombent, un à un, et la vérité se dévoile page après page, dans une descente aux enfers inexorable. Et Lighieri nous embarque une fois encore avec talent dans cette part de monstruosité qui donne à ses personnages une véritable substance.
Le lecteur est pris dans la tourmente et découvre avec effroi les effets de surprise de ce roman où alternent les récits de chacun des personnages. Plus on tourne les pages, plus le malaise est palpable dans ce qui se joue au sein des relations familiales, grâce à cette énergie sauvage qui sous-tend l’écriture, permettant de donner au récit l’intensité désirée. Il y a chez Lighieri une grâce à jouer avec la perversité. Elle mène sa plume tel un scalpel dans un huis clos étouffant où les sentiments se révèlent, s’exacerbent, parfois jusqu’à la folie grâce à une écriture vive et précise, emmêlant nos certitudes. Alors, plongez dans ce thriller où les requins vous sembleront moins dangereux que l’adoration pathologique d’une mère.