Pouvez-vous nous présenter la Maison Hugel ?
Nous sommes producteurs et négociants de vins, c’est-à-dire que nous achetons des raisins à des petits vignerons. Nous avons 30 hectares de vignes en propre situés uniquement à Riquewihr, complétés par 80 hectares pour l’activité négoce. Nous produisons 850 000 cols par an et possédons deux grands crus : le Schoenenbourg et le Sporen.
Les générations ont traversé les siècles, mais aussi les équipements. Vous conservez dans votre cave un foudre qui figure au livre Guinness des records…
Nous avons effectivement le tonneau Sainte Caterine qui est le plus vieux fût du monde en activité. Il date de 1715. Il a été confisqué au clergé pendant la Révolution française, puis il a été rétrocédé en 1920, mais l’Église n’en voulait plus, car elle ne produisait plus de vin. La famille Hugel l’a acquis en 1921. Il a une capacité de 8800 litres. Nous l’utilisons toujours, mais de façon modérée.
Aujourd’hui vous représentez la 13e génération à la direction de l’entreprise. Quel est le secret de la longévité ?
Je dirais qu’il faut produire de bons vins, cela commence par là. Et puis on ne peut pas exercer ce métier sans passion. Si on fait cela juste pour l’argent, la tentation de vendre est grande. À son décès, mon arrière-grand-père Jean avait déjà réglé les droits de succession pour les deux générations suivantes. Cela donne une bonne définition de comment maintenir l’héritage familial. Nous avons tous à l’idée qu’on ne travaille pas pour nous-mêmes, mais pour la génération suivante. Et nous essayons de transmettre l’entreprise dans un meilleur état que celui dans lequel nous l’avons trouvée.
Quel est votre regard sur les vins d’Alsace ?
Je suis persuadé que les vins d’Alsace peuvent devenir les plus grands vins blancs du monde. De par son climat et sa géologie, notre région est parfaite pour produire de grands vins blancs. Il y a un potentiel incroyable. Mais les Alsaciens ont un complexe d’infériorité. Je pense que le pire ennemi de l’Alsace ce sont les Alsaciens qui ont tendance à se dire « les grands vins ce n’est pas pour nous ». L’Alsace produit des vins de garde. Les grands rieslings sont à leur apogée à plus de vingt ans, cela mérite d’être su par les Alsaciens.
Julie Giorgi