La « chasse au pissenlit » me laisse d’exaltants souvenirs d’enfance : nous arpentions en mars les champs labourés. On devinait la présence du pissenlit à la pointe de la feuille qui dépasse des mottes de terre. Venait ensuite le plaisir d’enfoncer profondément le couteau dans la terre pour en retirer ces longues tiges nacrées surmontées de leur feuille découpée en forme de dent de lion. Ce serait dommage de se priver de cette manne gratuite qui nettoie le corps, donne de l’énergie et est remplie de fer. La liste des propriétés thérapeutiques attribuées au pissenlit est longue. Il est l’une des plantes comestibles et officinales les plus connues et utilisées. Il pousse partout à travers le monde.
On trouve cette plante vivace dès le mois de mars dans les champs et les prés. Lorsqu’il pousse en surface, au contact de l’air, le pissenlit est très vert et recèle une amertume, plus ou moins forte selon sa parcelle de provenance. Le même, recouvert d’un monticule de terre, ferait jaillir des feuilles jaunes, aux tiges blanches, craquantes, sans amertume. Ce pissenlit tendre se trouve dans les champs labourés. Dans les prairies, les taupes, sans le savoir, fabriquent par leurs monticules de terre meuble de merveilleux lieux de jaunissement du pissenlit.
Ma grand-mère paternelle aimait le manger d’une façon étonnante : en le faisant revenir quelques minutes à la poêle, comme les épinards, et en lui ajoutant un peu de vinaigre avant de le déguster. Ce pissenlit cuit, flasque, terni, légèrement bruni, dévêtu de sa couleur verte, a une apparence attristante, mais son goût typé est prisé des amateurs.
Vert ou jaune, il est apprécié en salade avec des œufs et du lard fumé grillé. Il constitue ainsi une entrée ou un plat avec des pommes de terre en robe des champs, des oignons blancs et du munster. Ses boutons au vinaigre accompagnent à merveille terrines et poissons fumés. Ses fleurs parfument crêpes et blinis. Elles donnent aussi une excellente gelée dite «miel de pissenlit». Ses racines sont appréciées, cuites comme un légume, ou alors séchées comme la chicorée.
Le pissenlit réjouit aussi le regard lorsqu’il éclot et fait ressembler les prairies à des mers d’or. Avec ses pétales, il est possible de réaliser une délicieuse gelée, miel de pissenlit ou de cramaillot en Franche-Comté. Ses feuilles et ses racines sont appréciées en tisanes ou en décoction. Dans le livre La cuisine naturelle des plantes d’Alsace (La Nuée Bleue) que j’ai co-écrit avec Hubert Maetz, ce dernier propose des recettes à la fois simples et inventives comme le beurre de pissenlit, la purée de racines de pissenlit, des blinis aux fleurs de pissenlit, une limonade de fleurs de pissenlit : que du bon qui ne vous fera pas craindre de… manger le pissenlit par les racines.
Nom français : pissenlit, dent de lion, laitue de chien, couronne de moine, florion d’or, salade de taupe, couronne de moine, cramaillot. La dénomination « dent de lion » est en référence à la forme dentelée de sa feuille. La langue anglaise s’est servie de l’expression « dent de lion », pour désigner le pissenlit par cette déformation inattendue, à prononcer à l’anglaise : « dandelion ».
Différentes dénominations en alsacien :
La force diurétique du pissenlit se devine à sa dénomination française, mais aussi à celles en alsacien Brunzblüem et Bettseicher ou Bettbrunzer. Le verbe brunze dans Brunzblüem, et son synonyme, seiche, dans Bettseicher, signifient uriner. Le terme allemand Bettnässer, c’est-à-dire «mouilleur de lit», un terme plus adouci, abonde dans le même sens.
Nom allemand : Bettnässer, Löwenzahn, Röhrleinkraut, Butterblume, Kuhblume.